dimanche 28 février 2010

De précautions en précaution

Les catastrophes se succèdent : en Haïti, au Chili, à Madère, en France... Les conséquences en sont différentes ! C'est, dans les Caraïbes, par centaines de milliers que l'on a compté les victimes, par centaines ou par dizaines, en Amérique du Sud et en Europe.



C'est pourtant au Chili que le tremblement de terre aurait été le plus violent, s'il est vrai qu'on ait approché la cote de 8,8 sur l'échelle de Richter. La différence tient à ce que Port au Prince ignore les constructions parasismiques...

Les humains prennent-ils toutes les précautions qui s'imposent pour se protéger? Certes, on ne vit pas sans risques. Il n'est pas, pour autant, indispensable d'ajouter des risques à la vie. C'est, cependant, ce qui se passe.

Autre chose est de s'assurer que toutes les précautions sont prises en compte (c'est simplement éviter les imprudences !) et de mettre en œuvre le principe de précaution (qui est l'établissement de l'étude scientifique des risques contre lesquels il faut prémunir les populations).

De quelle précaution s'agit-il quand on évoque le "principe de précaution". Il y a débat entre ceux qui contestent la possibilité de développer des activités humaines sans multiplier les risques et ceux qui soulignent que pour produire toujours plus, avec toujours plus de profit, on fait souvent peu de cas des risques que vont, à leur insu, subir à des populations innocentes.

Abstraitement, il est assez simple de dire qu'on doit s'abstenir d'agir quand les effets possibles de ce qu'on fait risquent d'être plus dommageables que les bénéfices qu'on voudrait en retirer. En réalité, la question cesse d'être scientifique et devient éthique et politique quand on pense retirer un bien supérieur d'une activité produisant, temporairement, ou en petite quantité, un mal certain.

On débouche, alors, sur l'une des questions que pose la décroissance : peut-on et doit-on limiter les activités humaines ? La décroissance des risques peut avoir des conséquences économiques lourdes et bouleverser très profondément la géographie urbaine.

On sait que le Japon, comme la Turquie sont menacés par des séismes de grande ampleur. Tokyo a connu et connaîtra encore des tremblements de terre, mais l'on s'y prépare, aussi bien en architecture que dans les écoles où s'enseignent les précautions à prendre en cas de catastrophe. Il n'en est pas de même à Istanbul ! Cette mégapole, très peuplée, risque un drame d'ampleur plus considérable encore que celle de Haïti. Construire comme on construit à Istanbul est tout simplement irresponsable, sans précaution et donc criminel.

Il est une philosophie cynique à l'œuvre en bien des lieux : "après moi le déluge" s'élève à un niveau qui inverse le principe de précaution ! Aussi laisse-t-on bâtir sur les pentes des volcans en activité, comme à Naples. On a construit des centrales nucléaires dans la vallée du Rhône et notamment non loin de Bâle, ce qui est insensé, compte tenu de la fragilité sismique non négligeable de la zone. On a bétonné et bitumé des quartiers entiers de villes au risque de transformer des rues en torrents, et les places en lacs, en cas de pluies diluviennes comme il a été constaté, dans le sud de la France, et récemment à Madère.

Carte des zones de sismicité en France  métropolitaine

Il n'est pas vrai qu'il soit impossible de prévoir certains drames qui ne sont pas que "naturels" ! la conjonction du vent et de la marée haute à La Rochelle et ses environs ne pouvait que produire des inondations dévastatrices et les populations exposées ont été informées de façon globale mais pas de façon suffisante ! Quant à la tolérance de constructions basses, mal adaptées, en bordure de mer, il est inconscient de ne pas prévenir qu'au cours de plusieurs dizaines d'années, elles peuvent, exceptionnellement, être submergées. Les "zones inondables", que ce soit au bord des fleuves ou auprès de l'océan, sont trop souvent habitées par des familles imprudentes ou trompées par des promoteurs qu'on a laissé, quitte à violer les réglementations, intervenir pour satisfaire des intérêts !


C'est dans le cadre de la réflexion politique qu'il faut replacer le principe de précaution : l'écologie ne consiste pas à éliminer tous les risques mais à en mesurer, par avance, l'ampleur après analyse sérieuse de l'environnement humain concerné. On sait prévoir un tsunami mais on ne sait pas avertir, à l'avance, ceux sur qui il déferle ! On sait, désormais, que la Cordillère des Andes est une zone de risques sismiques importante, mais on oublie ces risques, y compris dans les États disposant des moyens de la précaution, comme à Los Angelès aux États-Unis !

Toute politique repose sur la recherche des moyens de "bien habiter la Terre". Le reste est inconscience ou cupidité. Le principe de précaution, regardé dans l'esprit de la décroissance, conduit non à modifier d'abord des comportements individuels mais à prendre les décisions collectives en amont des risques connus qui menacent des peuples entiers. Il est des décisions qu'on ne peut prendre et d'autres dont il faut réduire le champ d'application, dans l'intérêt de tous. Ce peut être douloureux; ce n'en est pas moins nécessaire !



Inutile de s'abriter derrière des digues dont la fragilité est minée lentement. Les polders sont, aux Pays-Bas, une œuvre admirable, et durable, constamment reprise et consolidée, sauf si montait encore les niveau des eaux de la mer. Il est vrai qu'il en est pour dire que le réchauffement climatique n'est pas dû à l'activité humaine mais une invention des idéologues écologistes. Ce serait plus confortable que Claude Allègre ait raison. Malheureusement, tout démontre que la planète est bouleversée par ce qu'on lui fait subir...


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