
Son sort dépend bien plus des hommes que des renards...

L'écologie politique sous l'éclairage de la dé-croissance et de la non-violence
Découvrez ce texte printanier et dédions-le à notre Président de la République qui ne bat pas encore en retraite.
L'analyse actuelle du financement des retraites repose sur des hypothèses de croissance économique et de gains de productivité à l'infini (souvent 1,5 % par an en moyenne). On oublie de se demander si c'est compatible avec les exigences d'une société soutenable, si le bien vivre des futurs retraités ne risque pas d'être compromis par ces stratégies de croissance, et si la croissance quantitative ne va pas s'effondrer quoi que l'on fasse dans les pays riches, du fait de l'épuisement d'une nature surexploitée et de la fin du pétrole et d'autres ressources indispensables à des gains de productivité globaux.
Il serait temps de s'interroger sur le paradoxe qui consiste à défendre l'environnement des générations futures à propos du climat et à l'oublier lorsqu'il est question de leurs retraites à long terme. Cela conduit-il à un pessimisme aggravé ? Si les hypothèses du Conseil d'orientation des retraites (COR) en matière de croissance doivent être revues à la baisse, si la croissance quantitative devient nulle, n'est-ce pas pire encore que les scénarios actuels ? En aucun cas, à condition toutefois de sortir des raisonnements économiques standard. Il existe deux pistes crédibles à combiner : la réorientation de la production vers des "valeurs ajoutées durables", sans croissance globale des quantités, et le partage des richesses.
La première piste revient en fait à rappeler que la richesse nationale qui sert de base au financement public n'est pas dans les quantités mais dans la valeur ajoutée. Les scénarios productivistes oublient la possibilité de produire plus de valeur ajoutée, sans croissance quantitative, par une montée en durabilité (qui échappe largement aux mesures de la croissance en volumes). A quantités produites identiques, il y a nettement plus de valeur ajoutée monétaire (et d'emplois), donc de richesse économique, donc de bases de financement de la protection sociale, dans les productions les moins polluantes et les plus douces avec la nature. La valeur ajoutée durable devrait devenir la grande ressource économique du futur, à l'opposé de la mythique croissance verte.
La deuxième piste est le partage des richesses. Pas seulement les richesses marchandes. Le pouvoir d'achat des retraites, c'est très important, surtout pour les petites et moyennes retraites dont la régression est programmée. Mais il faut aussi développer des services hors marché (santé, culture et sport, transports collectifs, soins pour tous...) et l'accès à des richesses non économiques (liens sociaux, participation citoyenne, richesses naturelles...) pour fonder le bien vivre des retraités.
Pour financer les retraites, les dizaines de milliards d'euros à trouver annuellement existent déjà, sans croissance. Il faut les sortir des "niches" fiscales et sociales les plus contestables et prendre l'argent là où il est : les hauts revenus (qui ont bénéficié de dix ans de cadeaux fiscaux énormes) y compris les retraites indécentes, l'excès de profits, la spéculation, la fraude fiscale et les niches et paradis fiscaux. En tout, cela fait 80 à 100 milliards d'euros par an de manque à gagner pour les finances publiques. Qui plus est, ces deux pistes se confortent mutuellement. La montée en durabilité de la valeur ajoutée élargit la base de financement, et la réduction des inégalités est favorable à l'adoption de politiques écologiques socialement acceptables.
Avec de telles orientations, le droit à une retraite de bonne qualité à 60 ans peut être assuré durablement. Ceux qui défendent cet acquis ont d'excellents arguments. La retraite à 60 ans reste un outil majeur à la fois de partage du temps de travail (quand il y a quatre à cinq millions de personnes au chômage ou en sous-emploi et quand l'âge moyen de cessation d'activité est de 59 ans) et de relativisation de l'emprise excessive du travail et de l'économie sur la vie et sur la nature. Ce ne sont pas les activités bénévoles d'utilité sociale et écologique qui manquent pour des "seniors associés", qui ont d'autres projets de vie que la chaise longue.
Rien de surprenant si l'on regarde l'horizon. Qu'est-il en train de se jouer durant ces premières décennies du XXIe siècle ? La convergence progressive des niveaux de vie à travers la planète. Du fait de l'unification de la culture mondiale, la logique d'une égalisation des niveaux de vie s'impose progressivement.
L'étonnante émergence de puissances comme la Chine, l'Inde ou le Brésil n'est pas autre chose que la manifestation de ce basculement historique.
Il s'agit de retrouver la situation précédant la révolution industrielle, quand un Chinois ou un Indien partageait peu ou prou les mêmes conditions d'existence qu'un Européen. Mais la contrainte écologique fait que cette convergence ne peut pas se faire par le haut : les dirigeants du G20, dont le communiqué est marqué de l'économisme le plus étroit, l'ont oublié, mais l'environnement frappe sans arrêt à la porte, comme le montrent par exemple en ce moment la marée noire du golfe du Mexique, les pluies diluviennes en Chine ou les inondations au Brésil.
La convergence ne pourra pas se faire au niveau dont jouissent les Occidentaux, parce que l'équilibre écologique, déjà mal-en-point, n'y résisterait pas. Elle va s'établir bien plus bas. Cela signifie qu'Américains et Européens doivent réduire leur consommation matérielle. S'appauvrir, pour parler clair.
C'est ce qu'ils commencent à faire, nolens volens, du fait de la crise économique, qui est née de leur oubli de l'environnement par une surconsommation qu'a entretenue un endettement démesuré. Comme le disait Angela Merkel à Paris dès janvier 2009, "les pays industrialisés doivent absolument comprendre que nous avons vécu au-dessus de nos moyens".
C'est cela qui se joue en ce moment. On ne saurait oublier une donnée vitale, toujours tue par les économistes médiatiques : l'inégalité immense qui règne aujourd'hui.
La réduction de la consommation matérielle ne peut être bénéfique que si elle se fait équitablement. Cela suppose une redistribution drastique de la richesse, la socialisation du système financier, et l'investissement dans les biens communs utiles socialement et peu dommageables écologiquement : l'éducation, la culture, la santé, l'agriculture, une autre énergie. Les maîtres au pouvoir font l'inverse. Et la crise continue.
Éragny et les « Gens du Voyage ».
Si l'on examine le cas d'une petite commune (17 000 habitants), "de bonne volonté", on s'aperçoit que, là comme ailleurs, les questions posées à la collectivité par l'habitat mobile ou la culture propre aux tsiganes ne sont pas véritablement prises en compte. Il s'ensuit des nuisances que l'on a un peu trop vite l'habitude de mettre sur le dos de cette population mal aimée.
Éragny-Magazine, dans son numéro 164, page 8, effectue le constat que les passages de caravanes sur le territoire communal sont difficiles à interdire. « Des procédures complexes » ralentissent l'exécution des mesures coercitives mettant fin à ces stationnements illégaux.
Certes, « les voyageurs ont laissé les lieux propres et déposé un don pour la Caisse des Écoles », mais, durant une bonne partie du printemps, les « contrevenants » ont bravé les autorités au point que « la police, en trop petit nombre » a dû, à cette occasion, « constater son impuissance ».
S'il faut « prendre la mesure de la complexité de la gestion de ces dossiers », c'est en se portant en amont qu'on peut y parvenir, car il s'agit de bien plus que d'un dossier, il s'agit de la vie même de Français qui ont, par la loi, droit à vivre en habitat mobile et qui n'y parviennent pas.
La ville d'Éragny sur Oise, du reste épargnée par rapport à ses voisines Herblay, Conflans-Sainte-Honorine et même Saint-Ouen l'Aumône, n'est évidemment seule responsable de cette situation qui relève de politiques d'État mises en échec. Toutefois elle en porte sa part.
Trois publics sont susceptibles d'occuper, irrégulièrement, des terrains publics ou privés :
• des Voyageurs de passage qui, notamment aux beaux jours, se déplacent en Ile de France, comme le font les Tsiganes, depuis des siècles. Il s'agit, à 99%, de Français.
• des Voyageurs, Français également, qui se sont immobilisés (plus que sédentarisés) pour des raisons diverses, misère, vieillissement, lassitude, volonté de scolariser les enfants, artisanat local connu et bien accueilli..., et qui s'installent dans des friches ou des bois, sans droits ni titres.
• des tsiganes étrangers d'Europe de l'Est, le plus souvent roumains, donc membres de l'Union européenne, s'installant dans des cabanes et caravanes, en bidonvilles, ou, briévement, au bord de routes ou chemins, sous un pont, voire dans un squat.
S'agissant des Français, la loi Besson de juillet 2000, a prévu pour les communes de plus de 5000 habitants l'obligation de disposer d'une aire d'accueil et de stationnement. L'application de la loi, contestée, mal appliquée, avance à tout petits pas, mais avance. La ville d'Éragny, comptant, comme elle y a droit, sur ses partenaires de la Communauté d'Agglomération, ne satisfait pas elle-même cette obligation. D'où une difficulté : le concours de la force publique ne lui est pas garanti par le Préfet pour contraindre des familles de passage à quitter les lieux improvisés où elles stationnent.
Les habitants de la commune vivant dans des caravanes qui ne voyagent plus (ou fort rarement), depuis des décennies, et dans des conditions de très médiocre salubrité, sont, eux, en équilibre entre la tolérance et le rejet. On accepte leur présence de mauvais gré et on les laisse à leur sort, ce dont les intéressés se contentent... Quant aux propriétaires de parcelles mal placées (sous des lignes à haute tension, dans des zones inondables, ou sur le passage éventuel d'une infrastructure routière), ils tendent le dos, et prient le ciel que le malheur ou la malchance ne vienne pas ruiner leur vie.
Quant aux Rroms roumains, ils n'occupent que très occasionnellement des espaces de la commune. Ils ont parfois, par le passé, squatté une maison, mais s'ils restent géographiquement proches de la commune, ils ne s'y installent pas. Au reste, certains ont accédé au logement social et s'y tiennent.
Il convient, en effet, de ne jamais oublier que les Tsiganes, français ou étrangers, parviennent plus souvent qu'on ne le croit, à vivre dans un habitat fixe, pavillonnaire ou même en appartement.
Éragny n'échappe pas à cette situation « mobile » où les intéressés vivent dans des conditions très différentes. On aimerait que ces « dossiers » soient abordés de front et pas seulement quand des présences intempestives, et subies, obligent à considérer ce que, ordinairement, on ne regarde pas.