On pourrait sans peine nourrir ceux qui meurent de faim !
Les pertes agricoles et alimentaires coûtent chaque année à la planète l'équivalent de trois fois le lac Léman en eau gaspillée et occupent inutilement un tiers de sa surface agricole. La production de ces denrées non consommées provoque autant d'émissions de gaz à effet de serre que les Etats-Unis ou la Chine en six mois.
Pour rien. Dans
un rapport publié mercredi 11 septembre (format PDF),
l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture
(FAO) étudie les impacts environnementaux, jusqu'à présent peu
connus, de cet immense gâchis. Environ 1,6 milliard de tonnes de
produits alimentaires sont perdus chaque année dans le monde, soit
un tiers de ce qui est produit.
"L'empreinte carbone de la nourriture produite mais
jamais consommée est estimée à 3,3 milliards de tonnes de
CO2", affirme le rapport, un
chiffre qui représente à peu près la moitié des émissions de gaz
à effet de serre des Etats-Unis ou de la Chine. La production de ces
denrées gaspille annuellement 250 km3 de ressources en
eau et occupe 1,4 milliard d'hectares.
750 MILLIARDS DE DOLLARS EN COÛTS DIRECTS
Ce gâchis est évalué à 750 milliards de dollars (565 milliards
d'euros) en coûts directs par la FAO, qui rappelle que la réduction
des pertes agricoles et alimentaires pourrait largement contribuer à atteindre l'objectif d'augmentation de 60 % des denrées disponibles pour
répondre aux besoins de la population
mondiale en 2050. Selon la FAO, 54 % des pertes sont enregistrées
dans les phases de production, de récoltes et de stockage. Le reste
relève du gaspillage alimentaire au sens propre, au stade de la
préparation, de la distribution ou de la consommation.
Dans les pays riches, c'est ce dernier type de pertes qui domine.
Les experts ont cherché à déterminer quels étaient les régions
du monde et les produits agricoles responsables des plus importants
impacts environnementaux liés aux pertes alimentaires. "Les
pertes de céréales en Asie apparaissent comme un point chaud
environnemental significatif", tant pour leur bilan carbone
que pour leur consommation en eau et leur utilisation de terres
arables, conclut le rapport. Cela est dû notamment aux importants
volumes de production en Asie du Sud et de l'Est, ainsi qu'au poids
de la riziculture, qui émet de fortes quantités de méthane. Les
pays riches et l'Amérique latine sont à l'origine de 80 % des
pertes en viande, qui "ont un impact élevé en termes
d'occupation des sols et d'empreinte carbone", poursuivent
les auteurs. Les pertes de fruits en Asie, en Amérique latine et en Europe
comptent parmi les principaux responsables du gaspillage de l'eau.
Pour remédier à cette situation, la FAO préconise
l'amélioration des pratiques agricoles ainsi que des infrastructures
de stockage et de transport dans les pays en développement. Elle
estime que les pays riches ont "une responsabilité majeure
en matière de gaspillage alimentaire en raison de leurs modes de
production et de consommation non durables".